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Compensations environnementales et agricoles ?
Proposé par GAUTHIER Jean-François Le 09 novembre 2024
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Lors de la visite de site et des diverses réunions d'information et de concertation a été évoquée la démarche "ERC", Éviter, Réduire, Compenser qui doit être appliquée lors de l'élaboration du projet.
Au niveau environnemental et agricole je ne vois pas comment les impacts pourront être évités ou diminués puisqu'il y aurait suppression d'une zone agricole de 11ha dont une partie (5ha) est également une zone humide.
Au niveau compensation environnementale il a été fait mention de la création de noues pour l'infiltration des eaux de pluie, c'est mieux que rien, mais quelques dizaines de mètres carrés ne compenseront pas 5ha d'une zone d'infiltration étalée et donc plus efficace qu'une zone concentrée qui infiltrera plus rapidement ces eaux dans la nappes phréatique.
Et au niveau agricole, un agriculteur présent lors de la visite des abords du site a fait remarquer que la compensation en terme de terrains, éventuellement de surface supérieure à celle préemptée, ne pourra pas être équivalente à proximité vu le manque de foncier agricole disponible. La représentante d'Isère Aménagement a alors parlé d'une compensation financière, en supposant que l'agriculteur (ou les agriculteurs) concerné(s) accepte(nt), il y aura de toutes façons une perte irréversible de surface cultivables et donc de la production agricole globale du Grésivaudan.
Ceci n'est-il pas en contradiction avec les propos de Joris BENELLE, directeur général des services à la communauté de communes Le Grésivaudan qui a expliqué, lors de la web conférence du 7 octobre, que dans la version amendée du projet de territoire de 2018 "Le nouveau projet de territoire intègre pleinement les transitions écologiques, avec des aménagements qui tiennent compte de l'environnement, tant au niveau des infrastructures que des usages" ... Il met également en avant "la nécessité de diversifier l'économie locale, avec une politique forte de redynamisation des commerces en centre-bourg et un soutien accru à l'agriculture et à la forêt. L'objectif est de reconquérir les terres agricoles, en aidant les agriculteurs à développer leur activité." ???
... reconquérir les terres agricoles ? dans ce projet je vois encore des pertes de SAU (Surface Agricole Utile).
Et vu qu'Isère Aménagement est mandaté par notre communauté de commune, je suggère d'avoir une vision globale en incitant à minima, si ce projet se réalise, à ne pas préempter d'autres terres agricoles sur le territoire, je pense notamment au secteur de Grignon à Pontcharra, et au mieux à préserver également les 5ha de zone humide situés en aval de l'extension prévue.
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Bonjour,
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Le projet de territoire prévoit en effet la conservation des 11 000 hectares de surface agricole utile (SAU) ou équivalent en valeur ajoutée à horizon 2030. Cela sera mis en œuvre à travers plusieurs outils de gestion du foncier agricole, dans un contexte de forte pression sur le foncier agricole.
Tout d’abord, en septembre 2019, la CCLG a donné 4 orientations et ambitions à sa politique agricole :
1.Changer d'échelle pour mettre des produits locaux dans l'assiette des habitants > Ambition 2030 : 80% d’approvisionnement durable et 50% d’approvisionnement bio dans les cantines publiques du territoire
2. Réussir la transition vers un modèle plus résilient > Ambition 2030 : Une agriculture bio et HVE sur 100% des surfaces agricoles des périmètres rapprochés et éloignés des captages d’eau potable, sur 50% des surfaces globales
3. Conserver la capacité de production agricole du territoire pour répondre aux besoins alimentaires des habitants > Ambition 2030 : Conserver les 11000 ha de Surface Agricole Utile (SAU) ou équivalent en valeur ajoutée
4. Faciliter le dialogue entre agriculteurs, habitants et élus > Ambition 2030 : Apaiser les tensions
Cette politique se décline à travers des plans d'action triennaux (2020-2023 et 2023-2026) qui traduisent de manière opérationnelle l’ambition de rendre l’écosystème agricole et alimentaire territorial résilient dans un contexte de transition agricole. Le plan d’action 2023-2026 est associé à des moyens financiers importants sur les 4 ans de mise en œuvre :
- Budget Fonctionnement : 1.17 M€ TTC
- Budget Investissement : 1.20 M€ TTC (auxquels viennent s’ajouter les 2 M€ du fonds de concours transition agricole)
Les actions menées par le Grésivaudan pour pérenniser l'usage des terres agricoles consistent à :
- la veille foncière : Grâce à la convention ente la SAFER et l’intercommunalité, Le Grésivaudan mène une veille active sur les ventes de foncier agricole et demande régulièrement à la SAFER d’intervenir en préemption, en accord avec la profession agricole et la commune concernée. Depuis 2013, la SAFER est intervenue sur plus de 35 ha, évitant ainsi que ce foncier agricole sorte de l’agriculture. Cette intervention permet également de limiter la hausse des prix agricoles de référence. Lorsque le propriétaire ne retire pas le bien de la vente, le bien fait l’objet d’un appel à projet auprès des agriculteurs et porteurs de projet d’installation. Des tènements ont pu être ainsi vendus ou loués à des agriculteurs.
- la reconquête agricole et maintien des espaces ouverts : Ce dispositif subventionne les travaux effectués par les agriculteurs, pour reconquérir ou maintenir ouvert de la terre agricole. Depuis 2011, il permet la réouverture, le défrichement de surfaces autrefois agricoles. Depuis 2022, il permet en plus d’équiper ces parcelles pour assurer leur fonctionnalité et donc le maintien de ces espaces ouverts. Ce dispositif a ainsi permis d’intervenir sur 150 ha depuis sa mise en place. A savoir qu’il prend de plus en plus d’ampleur puisque depuis 2020 ce sont 85 ha qui ont été reconquis.
- la participation au GIP (Groupement d'intérêt public) du Fonds départemental d’investissement agricole et agroalimentaire : versement d’une contribution au Fonds de 1 € du m², dans le cadre de projets d’aménagements affectant des espaces agricoles, permettant ainsi le financement de projets structurants et innovants. (exemple : Aménagement de l’abattoir du Fontanil)
- Périmètre de Protection des Espaces Agricoles et Naturels (PAEN) : En plus de la commune du Touvet, 13 nouvelles communes ont arrêté un projet de périmètre PAEN Grésivaudan pour la mise en valeur et la protection des espaces agricoles et naturels. Total Surface des périmètres PAEN sur Le Grésivaudan : près de 9 000 ha
- Accompagnement des communes du territoire pour valoriser l'agriculture et maintenir la production alimentaire avec la création d’un fond de concours « transition agricole pour une production nourricière local de qualité » doté de 2 M€ sur 2 ans pour faciliter l'interventionnisme des communes sur ce sujet.
- Organisation de formations pour les élus et agents du Projet Alimentaire Inter Territorial (PAiT) : 13 thèmes proposés, 30 sessions organisées, 220 participants issus de 80 structures.
Entre 2018 et 2022 sur les 61 ha/an de recul des surfaces agricoles, 38 ha/an sont perdu par une consommation masquée soit 62%, et 23 ha/an par de l’artificialisation soit 38%. (selon les chiffres de la Safer, OFPI). La consommation masquée concerne des espaces productifs agricoles par les non-agriculteurs qui se rendent propriétaires de terres, soit lors d’un achat résidentiel (acquisition d’une maison + jardin + quelques milliers de mètres carrés de terres ou prés), soit lors d’achats d’agréments (achat d’un pré, extension d’un jardin, etc.). Ces terrains ne sont pas soustraits de « l’espace nature », car ils ne sont pas urbanisés, mais ils acquièrent un usage de loisirs difficilement réversibles.
Pour mémoire, le Grésivaudan a la possibilité d’investir dans la politique agricole déclinée ci-dessus notamment grâce à la présence sur son territoire d’un tissu industriel qui génère de précieuses ressources fiscales.
La veille foncière permet notamment d’être vigilant sur les ventes de parcelles lorsque celles-ci ne sont plus mises en valeur par l’agriculture ou risquent de ne plus l’être. Elle permet d’être réactif et de solliciter une demande de préemption par la SAFER. Cette préemption donne lieu à un Appel à Candidature auquel les agriculteurs intéressés ou les communes peuvent candidater pour acquérir et exploiter cette terre.
Autre exemple : l’accompagnement à la restauration de parcelles agricoles, non exploitables en l’état, a été mis en place sous forme d’un appel à projet annuel intitulé « reconquête agricole »
Ces différents outils sont précisés dans le bilan de la stratégie foncière 2017-2021 disponible en ligne : https://www.le-gresivaudan.fr/1626-conserver-notre-capacite-de-production-agricole.htm
Cet enjeu de reconquête des terres agricoles doit cependant être concilié avec les différents usages du territoire. Ainsi, le foncier dédié à l’agriculture doit être pensé au regard du foncier destiné à l'habitat et à l'économie, mais aussi aux enjeux de raréfaction du foncier disponible.